Législatives 2024 - rappel des droits et obligations des agents en période électorale
18 juin 2024
Les élections législatives auront lieu du 30 juin au 7 juillet 2024 afin d’élire les députés, membres de l’assemblée nationale.
La présente circulaire a pour objectif de rappeler les obligations qui pèsent sur les agents de la Nouvelle-Calédonie dans le cadre de la campagne électorale qui précédera l’organisation de ces élections.
Comme tout citoyen, les agents sont en droit de participer aux élections et à la campagne qui les précède.
A ce titre, ils disposent ainsi de droits qu’ils doivent cependant exercer dans la limite de certaines obligations.
En effet, en raison de leur qualité d’agent public, ils sont assujettis, durant et en dehors du service, aux obligations de neutralité et de discrétion professionnelle, d’une part, et au devoir de réserve, d’autre part.
Ainsi, leur statut, notamment les dispositions de la délibération n° 81 du 24 juillet 1990 portant droits et obligations des fonctionnaires de Nouvelle-Calédonie et les principes reconnus par la jurisprudence administrative, leur imposent une certaine modération tant dans leurs propos que dans leur comportement. La liberté d’opinion et d’expression, garantie aux agents publics, doit donc se concilier avec leurs obligations, notamment de réserve, particulièrement durant une période électorale.
Ces obligations trouvent leur justification dans l’intérêt général et ne sauraient souffrir d’aucune violation motivée par des considérations personnelles.
La présente circulaire s’adresse à l’ensemble des agents publics :
- fonctionnaires de la fonction publique de Nouvelle-Calédonie ;
- agents contractuels de droit public (ACDP).
I- Les obligations de secret et de discrétion professionnels
L’article 20 de la délibération n° 81 du 24 juillet 1990 susmentionnée dispose que :
« Les fonctionnaires sont tenus au secret professionnel dans le cadre des règles instituées par le code pénal. Les fonctionnaires doivent faire preuve de discrétion professionnelle pour tous les faits, informations ou documents dont ils ont eu connaissance dans l’exercice ou à l’occasion de leurs fonctions. En dehors des cas expressément prévus par la réglementation en vigueur, notamment en matière de liberté d’accès aux documents administratifs, les fonctionnaires ne peuvent être déliés de cette obligation de discrétion professionnelle que par décision expresse de l’autorité dont ils dépendent ».
Il résulte de ces dispositions que l’agent est soumis aux obligations de :
- secret professionnel ;
- discrétion professionnelle.
L’obligation de secret professionnel consiste, pour l’agent, à ne pas révéler de renseignements ayant un caractère personnel et secret dont la divulgation aurait des conséquences nuisibles pour un administré (informations relatives à la santé, à la situation personnelle ou familiale, etc.).
Cette obligation vise à la protection des usagers du service public et des agents travaillant au sein des services de la Nouvelle-Calédonie. A la différence de la discrétion professionnelle, le secret professionnel protège l’administré et non l’administration.
Le manquement au secret professionnel :
- peut constituer une faute justifiant le prononcé d’une sanction disciplinaire ;
- constitue une infraction pénale et peut, à ce titre, être puni, en vertu de l’article 226-13 du code pénal, d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende, soit 1 789 950 F. CFP.
L’obligation de discrétion professionnelle, quant à elle, vise à protéger l’administration contre la divulgation d’informations relatives au service qui pourrait nuire à l’accomplissement normal des tâches ou à la réputation de la Nouvelle-Calédonie.
Cette obligation :
- implique que les agents publics doivent faire preuve de discrétion professionnelle pour tous les faits, informations ou documents dont ils ont connaissance dans l’exercice ou à l’occasion de leurs fonctions ;
- concerne tous les documents qui ne sont pas communicables en application de la réglementation relative à la liberté d’accès aux documents administratifs (par exemple, les rapports établis lors des entretiens, les éléments de la rémunération qui sont fonction de la situation personnelle ou familiale, les rapports d’expertise médicale).
Le manquement à l’obligation de discrétion professionnelle peut être sanctionné sur le plan disciplinaire.
Seule une décision expresse de l’employeur peut décider de lever cette obligation.
II- L’obligation de neutralité
La neutralité du service public est un des grands principes qui fondent celui-ci. Elle est le corollaire de l’égalité de tous devant le service public.
En vertu de ce principe, les agents publics doivent servir l’administration en toute impartialité, c’est-à-dire, traiter de façon égale et sans distinction tous les usagers.
Ainsi, cette obligation impose que leur comportement, tous les actes ou les décisions qu’ils prennent, doivent être dictés uniquement par l’intérêt du service et non par des convictions notamment politiques.
Tout manquement à cette obligation est de nature à compromettre gravement le sentiment d’impartialité que les usagers ont à l’égard du service public et par là même porter atteinte à sa crédibilité, donc à l’intérêt général.
D’une façon générale, l’obligation de neutralité leur interdit de faire de leurs fonctions l’instrument d’une propagande quelconque.
Ainsi, il leur est interdit de faire de la propagande politique à l’égard des usagers du service ou de leurs collègues ou même de faire état de leurs convictions en exposant, par exemple, dans leurs bureaux ou dans les bâtiments publics, des objets à caractère politique.
De surcroît, il leur est notamment interdit :
- d’utiliser la messagerie électronique professionnelle à des fins de propagande ;
- de distribuer des tracts pendant et en dehors des heures de service au titre de leurs fonctions ;
- d’organiser des réunions politiques dans les locaux de travail.
Enfin, en vertu de l’article L. 50 du code électoral, il leur est interdit de distribuer « des bulletins de vote, professions de foi et circulaires des candidats », en se réclamant de leurs fonctions et non en leur nom personnel.
Le non-respect de cette obligation peut constituer une faute grave de nature à justifier une sanction disciplinaire.
III- Le devoir de réserve
Si les agents publics jouissent de la liberté d’opinion garantie par la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ils ne peuvent user de la liberté d’expression qu’avec modération. C’est le sens de l’obligation de réserve définie par la jurisprudence.
Le devoir de réserve se traduit, même en dehors du service, par l’observation d’une certaine retenue dans l’extériorisation de leurs opinions, notamment politiques, et ce, afin d’éviter que leur comportement ne jette le discrédit sur l’administration ou ne porte atteinte à la dignité des fonctions exercées.
Ce devoir concerne l’ensemble des agents quels que soient le service et le lieu concernés, et même si l’affichage des opinions se fait en dehors du lieu et des horaires du service.
Il ne porte pas sur le contenu de ces opinions, mais sur la façon dont elles se traduisent par la parole, l’écrit ou l’action.
Par conséquent, le respect de ce devoir leur impose d’éviter, en toutes circonstances, les comportements, les déclarations orales ou les publications pouvant porter atteinte à la considération du service public à l’égard des administrés et des usagers.
Ainsi, un agent militant pour un candidat doit veiller à ne pas montrer ouvertement son hostilité à l’égard d’autres candidats ou élus, et ne peut critiquer violemment son action et tenir des propos outranciers ou diffamatoires.
J’insiste sur le fait que ce devoir ne se cantonne pas à la sphère professionnelle mais recouvre également la sphère privée.
Le non-respect de ce devoir est susceptible de constituer une faute pouvant justifier une sanction disciplinaire.
Enfin, je rappelle que tout manquement à cette obligation et ce devoir sera sanctionné plus sévèrement si le fonctionnaire concerné occupe une fonction à responsabilités.
IV- Illustrations
A titre d’exemple, est justifié :
- le déplacement d’office d’un fonctionnaire qui a diffusé, à deux reprises, dans une publication dont il est l'auteur, des propos mettant gravement en cause le fonctionnement de son administration ;
- l’exclusion temporaire de fonctions d’une durée de trois jours d’un fonctionnaire qui a pris la parole pendant une réunion publique afin aborder des sujets à caractères politiques (sujets qui n’étaient pas à l’ordre du jour) et qui a remis en cause les capacités professionnelles du secrétaire général, les chefs du service ainsi que les convictions politiques et sociales des élus ;
- l’exclusion temporaire de fonctions d’une durée de 6 mois d’un agent qui a pris la parole en public afin de faire état du montant de sa rémunération en indiquant que celui-ci était insuffisant au regard de ses compétences, a critiqué l’administration et a menacé d’engager une procédure contentieuse à l'encontre de sa collectivité ;
- d’une révocation d’un agent qui, depuis son profil facebook, a réitéré des propos à caractère outrancier et vexatoire, durant une période de plus d'un mois et a repris à l'occasion des opérations électorales de second tour du 28 juin 2020, qui ne se limitent pas à critiquer de manière virulente l'action menée par les élus depuis le début de son mandat, mais contiennent des accusations portées à l'endroit de sa personne, qualifiée entre autres d'égocentrique, de narcissique, ou d'inapte à gérer les affaires de la commune, de nature à remettre en cause son honneur.